Tuto : Evaluer l’impact humain de la chaleur avec Python et la librairie Thermofeel

Callendar
5 min readOct 8, 2021

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Avec près de 50°C fin juin dans l’ouest du Canada, l’été 2021 nous a offert une illustration brutale des effets du réchauffement climatique. A ce niveau de température, les dommages sur les infrastructures, l’agriculture et l’environnement sont immédiats. Mais qu’en est-il de la santé humaine ? Dans ce tutoriel, nous allons voir comment évaluer rapidement les effets la chaleur sur le confort et la santé grâce à Python et à Thermofeel, une librairie récemment publiée par le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme.

Intérêt des indices de confort thermique

Pendant les canicules, nous avons généralement les yeux rivés sur le thermomètre. Mais la température ne dit pas tout… Une même température sera évidemment plus facile à supporter s’il y a du vent ou si le soleil est voilé. En sens inverse, l’humidité aggrave très vite la sensation d’inconfort causée par la chaleur.

L’objectif d’un indicateur de confort thermique est de refléter cette réalité complexe. Il existe de nombreux indicateurs dont certains nécessitent des calculs compliquées.

C’est ici qu’entre en scène Thermofeel. Cette librairie Python développée par l’ECMWF, le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme, permet de calculer une dizaine d’indicateurs de confort thermique parmi les plus fréquents : température ressentie, température de thermomètre mouillé, Humidex, Indice de chaleur, indice universel de climat thermique, etc.

Vous pouvez installer cette librairie simplement avec :

pip install thermofeel

En pratique, les indicateurs de confort thermique peuvent être utilisés pour déclencher une alerte canicule, suspendre le travail en extérieur, renforcer les capacités d’accueil des hôpitaux… Certains peuvent même permettre d’anticiper les impacts techniques de la chaleur : par exemple les performances des tours aéroréfrigérantes utilisées pour le refroidissement de centrales électriques varient avec la température de thermomètre mouillé.

50°C, c’est inconfortable ?

Avec Thermofeel, la calcul de chaque indicateur prend en entrée un datarray. Le résultat est également renvoyé sous forme de datarray. Nous allons donc avoir besoin de Xarray. Si vous ne connaissez pas encore cette librairie, vous pouvez vous référer à nos précédent tutos.

Nous allons commencer par un cas très simple. Thermofeel propose une méthode de calcul simplifiée pour évaluer la température au thermomètre-globe mouillé en utilisant seulement la température de l’air.

Commençons donc par évaluer la valeur de cet indicateur pour une température de l’air de 50°C :

On obtient approximativement 36.6°C ce qui est supérieur à la limite physiologique humaine, généralement fixée à 35.

Calcul de la température nette pendant la vague de chaleur américaine de 2021

Maintenant que vous avez compris le principe, passons à un exemple un peu plus avancé. Nous allons calculer la valeur maximale d’un indicateur de confort thermique plus complexe pendant la vague de chaleur américaine de juin 2021.

L’indicateur utilisé dans cet exemple est la température nette (Net Effective Temperature), il s’agit d’un indice qui prend en compte la température, l’humidité et le vent. Il est fortement corrélé à la mortalité et il est utilisé par certains pays, dont l’Allemagne, pour le déclenchement des alertes canicules.

Pour le calcul de cet indicateur, il vous faut des données météo. Vous pouvez les trouver sur le Climate Data Store de Copernicus, le programme européen d’observation de la terre. Nous avons besoin de :

  • La température de l’air à 2 mètres (“2m temperature”),
  • La température de rosée (“2m dewpoint temperature”),
  • Les composantes nord-sud (“10m u-component of wind”) et est-ouest (“10m v-component of wind”) du vent à partir desquelles nous allons calculer la vitesse totale.

Via le formulaire en ligne ou l’API, téléchargez ces données au format netCDF pour l’Amérique du nord (de -160 à -60 de latitude et de 0 à 75 de longitude) pour la période de forte chaleur du début d’été 2021 (du 20 au 30 juin). Un précédent tutoriel vous explique en détail comment faire.

C’est fait ? Très bien, ouvrez le dataset :

Pour commencer, il faut calculer la vitesse du vent à partir de ses composantes. Elle est égale à la racine carré de la composante u au carré plus la composante v au carré. Une fois le calcul effectué on ajoute directement le résultat au dataset :

Nous avons maintenant tout ce qu’il nous faut pour calculer la température apparente en une ligne de code :

Cartographie des résultats

Récapitulons : nous avons calculé la température nette heure par heure du 20 au 30 juin 2021 sur le continent nord-américain avec une résolution spatiale de l’ordre de la dizaine de kilomètres.

Que faire de ce résultat ? Une exploitation possible est de cartographier la température nette maximale atteinte pendant la canicule. Pour cela, il suffit de prendre le maximum sur la dimension temps :

Mettre ces données sur une carte aidera à y voir plus clair. En pratique un simple da_max.plot() suffirait mais on peut faire une carte plus esthétique par exemple avec Cartopy :

Et voilà le résultat :

calcul d’un indicateur de confort thermique avec Python, xarray et Thermofeel.

La température nette est montée au-delà de 40°C sur toute la côte ouest des États-Unis mais aussi dans l’intérieur des terres au Canada, presque jusqu’au cercle polaire ! Elle a dépassé 50°C localement dans les régions de Seattle et de Los Angeles.

Amérique 2021 vs. Europe 2003

Pour prendre la mesure de cette vague de chaleur, comparons-la à la canicule européenne de 2003. Il suffit de reprendre notre code avec les données correspondantes :

Notez à quel point la combinaison de Xarray et Thermofeel rend ces calculs simples ! Il ne reste ensuite qu’a représenter les résultats sur la carte :

Comparaison des températures pendant les canicules de juin 2021 en Amérique et d’août 2003 en Europe

En termes de température nette maximale les deux canicules sont à peu près équivalentes. La vague de chaleur américaine de cette année se distingue cependant par son extension vers le nord : en 2003, le seuil de 50°C de température nette n’avait été franchi que dans le sud de la péninsule ibérique et les 40°C n’avaient pas dépassé de beaucoup la frontière française.

Cette extension est évidemment un facteur aggravant : une même température a plus d’impact lorsqu’elle rencontre des populations et des infrastructures peu habituées à la chaleur.

A propos : Callendar est une start-up spécialisée dans le développement de solutions innovantes pour l’évaluation des risques climatiques. Conscients du défi que représente l’adaptation au changement climatique, nous nous efforçons de partager notre expertise au travers d’outils gratuits ou de tutoriels comme celui-ci.

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